Rentrée tendue : quelle « thérapie » pour Radio France ?

Cette rentrée se déroule avec un nombre d’incertitudes et d’interrogations record à Radio France. La situation pèse lourdement sur les rédactions.

Quel financement pour Radio France ?

On l’ignore complètement pour 2025. Les échanges ont commencé avec les parlementaires et le message du SNJ est clair : il faut une loi pour sortir l’audiovisuel public du budget général de l’Etat. Et l’urgence porte aussi sur 2024 : Radio France ne connaît même pas le niveau de ses ressources pour finir l’année ! Depuis avril dernier, l’Etat a suspendu les versements du plan de transformation de l’entreprise, la part variable de notre budget. Mais les chantiers correspondants, eux, sont bien engagés. Le plus marquant, et le plus coûteux, consiste à changer le nom de France Bleu en Ici. Si l’Etat ne tient pas ses engagements, plus de 8 millions d’euros manqueront au budget de Radio France, avec un impact sur les antennes et les rémunérations. Il donc est urgent de suspendre ce qui peut encore l’être – à commencer par toute dépense liée à la marque ICI – tant que cet argent n’est pas débloqué : la direction doit le dire clairement aux équipes et à la tutelle.

Quel projet pour France Inter ?

A Inter, la rédaction a commencé la saison avec toujours un goût amer. Au retour de l’été, toutes les plaies ne sont pas refermées. Certes la direction a fait son mea culpa, après des mises à l’écart brutales et des changements radicaux, elle regrette la forme mais assume parfaitement le fond. Sur la ligne éditoriale, les interrogations demeurent et elles sont profondes. Elles touchent à l’identité même de la chaine et donc au sens de ce que font les équipes, et notamment la rédaction. Il y a comme une perte de boussole en cette rentrée.

Quel management pour France Info ?

A Info, c’est l’arrivée d’une nouvelle directrice qui suscite de l’incompréhension voire l’inquiétude en raison de son profil 100% télé et de graves accusations sur son management passé à France Télévisions. Face à une rédaction motivée mais fatiguée, poussée à faire toujours plus sans moyens supplémentaires, la bienveillance de la direction aurait été plus utile. Non, il n’y a certainement pas besoin de « poigne » pour diriger France Info, comme l’a exprimé la présidente de Radio France, mais au contraire de calme, de sens du dialogue et d’écoute. La nomination d’un nouveau chef de projet pour le rapprochement avec la télévision relance, par ailleurs, les inquiétudes sur l’avenir de la station et sa pérennité au sein de Radio France.

Quelle cohérence à France Bleu et quelles charges de travail ?

Cette année les grands changements étaient connus très en avance, les locales étaient priées de transmettre leurs grilles avant l’été… mais cela n’a pas empêché la direction d’exiger des modifications des rendez-vous d’« info d’ici » une fois la rentrée effectuée ! Avait-elle seulement lu les grilles ? Par ailleurs, le remplacement des journaux locaux à la demie par un flash national devait permettre de retrouver des moyens de reportage. Mais cette marge est en réalité absorbée par le maintien du deuxième matinalier et/ou la production des « infos d’ici », parfois pour une unique diffusion ! Le problème de charge de travail reste donc entier et il va s’aggraver car ce système est intenable à long terme, en particulier sur les week-ends et les vacances.

Enfin, le créneau réservé à France Bleu le vendredi soir sur France Inter – découvert dans la presse -, ne fait qu’alimenter les craintes sur la charge de travail des équipes, mais aussi de leurs cadres. Ces interventions en direct s’ajoutent aux missions des rédacteurs en chef déjà lourdes, notamment en prévision du week-end et du lundi.

Quelle vision de la direction de l’information ?

La nomination de Céline Pigalle à un double poste pose, pour le SNJ, les mêmes questions d’incompatibilités qu’avec Jean-Philippe Baille : une seule personne peut-elle vraiment diriger à la fois une grande radio et l’information de tout Radio France ? Surtout quand cette radio représente à elle seule près de 400 journalistes et 44 implantations ?

Si Radio France a vraiment l’ambition de représenter un pôle d’apaisement pour la société au sens large, elle doit d’abord retrouver ses repères et donner confiance à ses rédactions.

Rentrée tendue : quelle « thérapie » pour Radio France ?