Lettre de soutien des précaires de Radio France à la grève illimitée

Nous publions une lettre ouverte signée par 74 journalistes pigistes de nos rédactions. Sans elles et sans eux, impossible de faire tourner cette belle machine qu’est Radio France. Nous les remercions pour ce soutien précieux.

Nous, journalistes pigistes de Radio France, apportons notre soutien plein et entier à la grève illimitée pour défendre Radio France et l’audiovisuel public, et contre le projet de holding France Médias. Si notre statut précaire ne nous permet pas de nous mettre en grève, nous ne partageons pas moins les inquiétudes profondes exprimées dans les rédactions du réseau.

En tant que journalistes pigistes de Radio France, c’est souvent nos voix que vous entendez le week-end, pendant l’été ou les vacances scolaires sur les antennes d’ICI, France info, France inter, France culture et Mouv’. Nous travaillons quand les autres sont en congés, en vacances ou en arrêt. Nous ne comptons pas nos heures parce que nous avons choisi de travailler pour la radio de service public et nous sommes fier-es de tendre nos micros au quotidien. Nous sommes une part essentielle du fonctionnement des locales : souvent les premier-es appelé-es, souvent les dernier-es considéré-es.

Aujourd’hui, nous voulons dire nous aussi nos peurs pour l’avenir de Radio France. Nous voyons les suppressions de postes dans les locales où nous travaillons. Celles et ceux qui, parmi nous, travaillaient à Mouv’ se retrouvent aujourd’hui sans perspective. Et on nous refuse toujours le paiement des heures de nuit sur nos contrats-piges, “parce qu’il faut faire des économies”. Comme nos collègues titulaires, nous devons défendre et expliquer le changement de nom du réseau France Bleu, qui est devenu “ICI” il y a quelques mois. Ces choix stratégiques, nous avons du mal à les comprendre. Nous avons du mal à comprendre pourquoi la direction a choisi de mettre à la benne un nom qui était connu et reconnu dans nos régions. Nous avons du mal à comprendre l’argent dépensé (6 millions d’euros) pour changer tout le matériel siglé France Bleu dans les 44 locales. Nous avons du mal à comprendre ce choix qui a fait perdre des centaines de milliers d’auditeurs au réseau ICI depuis le début de l’année.

Et voilà maintenant ce projet de holding qui prévoit de regrouper plusieurs entreprises de l’audiovisuel public sous une même entité. Ce projet, qui va encore coûter cher, crée en plus de nouvelles incertitudes pour nous, pigistes. Nous sommes inquiet-es de voir se dessiner une logique d’économies qui risque, à terme, de remettre en cause notre présence. En fusionnant deux entreprises aux missions complémentaires mais aux logiques de fonctionnement très différentes, nous redoutons de devenir la variable d’ajustement.

Combien de postes restera-t-il demain, en CDI comme en CDD, si la logique est avant tout comptable ? Nous devons passer un concours interne, le “planning” pour devenir CDD et postuler en CDI à Radio France. Qu’en sera-t-il, si les ressources humaines sont mutualisées entre radio et télévision, alors que nos statuts, nos processus de recrutement et nos droits diffèrent ? En ce 26 juin, nous soutenons la mobilisation, car c’est aussi notre avenir professionnel qui se joue dans ce projet. Nous appelons la direction et les pouvoirs publics à entendre ces alertes, à nous laisser des moyens pour faire notre travail de journaliste au quotidien, et à garantir que la restructuration du service public audiovisuel ne se fera pas sur le dos des plus précaires.

Lettre de soutien des précaires de Radio France à la grève illimitée