Forfait jours : que veut Radio France ?

La direction vient de présenter son projet de passage des journalistes au régime du forfait- jour. Ses arguments principaux : ça existe déjà à France Télévisions et à France Médias Monde et puis les jours de congés des journalistes, régulièrement pointés du doigt par des organismes comme la Cour des comptes, sont un boulet au pied de Radio France au moment où l’État réduit nos budgets.

Au moins c’est clair : l’objectif de la direction, qui en fait LA négociation de l’année pour les journalistes, est de supprimer les congés divers (15 jours ouvrés, qui sont là pour compenser les jours fériés, le travail du dimanche et l’absence d’heures supplémentaires) et de ne plus payer les heures de nuit majorées, pour passer au forfait. Et elle n’est pas à un paradoxe près, puisqu’elle vend son projet comme le moyen de « travailler plus pour gagner plus ». Or, elle n’a plus le budget pour ce « plus ». Comme pour le CET, elle voudrait nous faire les poches d’un côté pour nous rendre l’argent de l’autre… mais en partie seulement.

Double arnaque

Dans tout accord de forfait-jour, par définition dérogatoire à la Convention collective des journalistes, l’employeur doit prévoir une contrepartie financière pour compenser les débordements horaires et les heures de nuit occasionnelles. Mais non seulement la direction refuse d’en communiquer le niveau avant la toute fin de la négociation, elle entend aussi dévoyer les principes du forfait-jour en incluant dans cette carotte financière le dédommagement des congés perdus. Jamais le SNJ n’acceptera ça !

Pour que chacun comprenne bien de quoi il s’agit, voici le forfait-jour tel qu’il fonctionne à France Télévisions : 197 jours travaillés (192 avec la semaine d’ancienneté), 5% de compensation financière (sur salaire de base et ancienneté), la réversibilité individuelle tous les deux ans, un forfait pour les heures de nuit régulières, l’indemnisation du travail de week-ends et une indemnisation à 125% des éventuels jours travaillés en plus.

Double sécurité

Rappelons que pour mettre en place le forfait-jour, il faut un accord majoritaire ET des conventions individuelles par avenant au contrat de travail, les deux sont nécessaires. Le forfait-jour ne peut donc pas s’imposer aux CDI déjà en poste, mais pourra l’être aux nouveaux arrivants, en cas d’accord collectif. Pour les CDD, la direction n’a pas tranché sa position.

Sur le fond, cette négociation pose une vraie question, celle du degré d’autonomie des journalistes. Pour mettre en place le forfait-jour, il faut, et c’est inscrit dans la loi, que cette autonomie d’organisation du travail soit réelle. Dans les faits, sur les postes postés comme en présentation nous n’avons aucune latitude sur l’organisation de notre journée, ni sur notre travail. Et ce n’est pas tellement différent en reportage, avec la conférence de rédaction quotidienne et l’impératif de rendre le travail le jour même, à des heures déterminées par la hiérarchie et les rendez-vous d’antenne.

Le SNJ ne voit ni la nécessité, ni la pertinence de cette négociation. Si l’objectif est de faire des économies sur le dos des journalistes, ce sera sans nous