Désinformation contre le service public : la tribune du SNJ

Libération publie ce mercredi cette tribune signée des co-secrétaires du SNJ Radio France, sous le titre « Radio France : la violence des attaques ad hominem, relayée par des élus, n’est pas supportable. »

Une présentatrice de France Inter stigmatisée pour ses liens supposés avec untel ou une telle, une autre dénigrée pour ses choix de mots à l’antenne, un éditorialiste de France Culture mis en cause, un correspondant à l’étranger de Radio France accusé d’être sous influence et faisant l’objet d’une attaque concertée en ligne… Cette petite musique, à laquelle le service public est malheureusement habitué, se fait aujourd’hui plus insistante.
Alors que nos journalistes travaillent avec indépendance et une forte exigence, certains veulent à tout prix y voir connivence, parti pris et dissimulation – quitte à en inventer.

Cette petite musique, qui a longtemps résonné à bas bruit aux oreilles des rédactions de Radio France, profite de la caisse de résonance offerte par les réseaux sociaux, via des comptes spécialisés ou non. Elle se fait plus insistante, plus agressive et plus précise. Ce n’est plus seulement le service public qui est attaqué et contesté ; ce sont ses acteurs. Des journalistes que l’on dénonce, en les citant nommément, que l’on désigne à la vindicte populaire : lors de manifestations à Paris, plusieurs confrères et consœurs ont été insultés et pris à partie.
Cette violence n’est pas supportable. Les journalistes doivent être libres d’exercer leur métier dans des conditions normales. Derrière les professionnels, il y a des femmes et des hommes dont la sécurité est mise en jeu.

Des réseaux sociaux aux parlementaires : tous responsables

Dans une société française chaque jour plus clivée, ces attaques ad hominem prospèrent.
Pire, elles trouvent désormais un surprenant écho auprès d’élus de tous bords, oppositions comme majorité. Ainsi des parlementaires – qui votent les budgets de l’audiovisuel public et contrôlent ses missions et ses charges – n’hésitent pas à partager et à reprendre à leur compte des affirmations mensongères propagées en ligne.

Accuser la presse d’être orientée quand elle ne va pas systématiquement dans le sens de ses propres opinions est un grand classique. C’est particulièrement fréquent à l’égard de l’audiovisuel public, qui applique pourtant des standards élevés de pluralisme. Quel comble de reprocher aux chaînes et aux rédactions de Radio France d’assurer leur mission !

De telles accusations, un tel acharnement n’ont plus rien à voir avec une légitime critique des médias. Le «service public bashing» nourrit la défiance généralisée et au final fragilise la démocratie.
Tous les élus, locaux comme nationaux, et de tous bords politiques, doivent le mesurer. Il est de leur responsabilité de prendre du recul avant d’accorder du crédit et relayer les attaques des redresseurs de torts qui dénoncent anonymement, sur des supports sans garde-fous. Il est de leur responsabilité de protéger les rédactions du service public contre les attaques infondées et de ne pas propager des fake news.

Il arrive aussi que des médias hertziens, titulaires d’autorisations d’émettre, se livrent au même genre de pratiques, pointant tel ou telle du doigt sur la base d’informations fausses.
Cela est tout simplement inacceptable et cela ne peut pas trouver son explication dans la concurrence, même malsaine, même exacerbée par les excellentes audiences de Radio France.
Le SNJ Radio France ne laissera pas les journalistes se faire insulter et subir des menaces indignes. Il saisira désormais systématiquement l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) lorsqu’il aura connaissance de ce type de propos.

Dans les rédactions de Radio France, les journalistes ne demandent qu’une seule chose : qu’on les laisse exercer leur mission d’informer le public, sereinement.

Désinformation contre le service public : la tribune du SNJ